CONCLUSION

 

 

Au sein d'un diocèse en grande partie déchristianisé, et ce malgré les efforts entrepris dans la seconde moitié du siècle par monseigneur Dupanloup, la paroisse Saint-Marceau d'Orléans conserve tout au long du XIXème siècle une forte vitalité de son sentiment religieux : dès la Révolution il s'exprimait déjà par la décision spontanée des habitants de se choisir leur curé.

 

Trois facteurs déterminants paraissent selon nous expliquer la pérennité des convictions religieuses à Saint-Marceau :

 

La profondeur de l'implantation historique

 

Le 7 mai 1429, un événement extraordinaire et mémorable s'était déroulé sur le sol même de la paroisse : au cours des combats pour la libération d'Orléans, Jeanne d'Arc avait été blessée et soignée près de l'église. Plus que dans tout autre paroisse de la ville, les habitants du sud de la Loire rendirent depuis un hommage fervent à l'héroïne, concrétisée à la fin du XIXème siècle par la reconstruction de l'église, premier sanctuaire dédié à la future patronne et protectrice de la France.

 

La force de la pression sociale et de l'encadrement des notables

 

Assistant le clergé au sein d'oeuvres de piété ou de charité critiquables par leur caractère paternaliste (les actions de bienfaisance développées par des notables de la paroisse n'étaient pas le fruit du désintéressement, mais bien le désir de maintenir l'ordre social en laissant les pauvres gens assistés dans une religieuse résignation) mais si utiles dans des domaines encore négligés par la municipalité, ces laïcs furent pour beaucoup dans le maintien et l'amélioration de l'exercice du culte. A la différence de paroisses "refroidies" par le manque d'appui et le désintérêt des notables locaux, la pratique religieuse à Saint-Marceau fut fortement stimulée par des laïcs qui, de leur propre initiative, ont cherché à l'enrichir par les confréries, la participation aux processions, les dons et legs d'objets ornementaux et cultuels. Le cas d'Henri Courtin, "bienfaiteur" parti en Bourgogne pour ramener les reliques du saint patron est à cet égard exemplaire.

 

La présente étude a surtout mis en relief l'action des laïcs au sein de la fabrique, toujours soucieux de bien administrer la paroisse et de défendre au mieux ses intérêts. Leur tâche fut rendue difficile par un manque chronique de ressources, résultant à la fois au niveau local de l'insuffisance du budget réservé au culte par le gouvernement français à l'époque concordataire, et de la pauvreté de la majeure partie de la population, vivant de la culture de la terre et dont la production était à la merci des aléas climatiques. Les trois grandes crues du milieu du XIXème siècle témoignent de la vie difficile des jardiniers de Saint-Marceau, obligés à chaque fois de repartir à zéro afin de faire vivre leur famille (les effets bénéfiques des crues, comme le dépôt d'alluvions fertiles, ne se faisait pas sentir dans l'immédiat).

 

Les bienfaits de l'ancienne fabrique disparue avec la loi de 1905 sont multiples. Ainsi, grâce à elle, la paroisse Saint-Marceau s'est dotée de l'église majestueuse et prestigieuse (car placée sous le vocable de Sainte Jeanne d'Arc) qui règle encore aujourd'hui la vie des chrétiens de ce secteur d'Orléans.

 

La qualité du clergé

 

Tout au long de cette étude et au cours des recherches préparatoires, nous avons été frappés dans plusieurs documents par la personnalité de la plupart des curés concordataires ayant exercé à Saint-Marceau, hommes intelligents et aptes à diriger une paroisse aussi importante de par son étendue et sa population. Beaucoup de ces prêtres ont terminé leur carrière d'une manière très honorable en étant nommés auprès de leur évêque. Fait remarquable, les vicaires généraux assistant l'actuel évêque d'Orléans sont tous deux d'anciens curés de Saint-Marceau.

 

Le poids des traditions (Saint-Fiacre, patron des jardiniers a encore été célébré cette année), la vitalité des laïcs et des religieux ont permis en définitive de faire de la paroisse Saint-Marceau l'exemple-type de la "bonne paroisse" tant souhaitée au niveau diocésain par le plus célèbre des évêques d'Orléans, Félix Dupanloup.